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Martin Heidegger, Les problèmes fondamentaux de la phénoménologie Empty Martin Heidegger, Les problèmes fondamentaux de la phénoménologie

par Robin Sam 21 Fév 2015 - 9:18
Martin Heidegger, Les problèmes fondamentaux de la phénoménologie, texte établi par Friedrich-Wilhelm von Hermann, traduit de l'allemand par Jean-François Courtine, NRF Gallimard. (Œuvres de Martin Heidegger, section II, Cours 1923-1944)

Ce volume est la traduction française du tome 24 de l'édition des œuvres de Martin Heidegger (Gesamtausgabe) aux Éditions Vittorio Klostermann.

"Professé à l'Université de Marbourg durant le semestre d'été 1927, le présent cours est paru en 1975, du vivant même de l'auteur, comme tome XXIV de la Gesamtausgabe dont il ouvrait la seconde section, celle des leçons prononcées de 1923 à 1944.

S'il est vrai, comme l'indiquait naguère Gérard Granel, que tous les ouvrages de Heidegger s'inscrivent, d'une façon ou d'une autre, "dans Sein und Zeit", et qu'ils en constituent autant de "morceaux", cela vaut a fortiori pour le présent volume, non seulement parce que le cours fait immédiatement suite à la publication du Hauptwerk, mais encore parce que son propos et son économie prolongent et répètent expressément l'entreprise d'Etre et Temps, comme le souligne d'emblée Heidegger : "Nouvelle élaboration de la troisième section de la première partie de Sein und Zeit."

Par son explicitation du temps comme horizon de la question du sens de l'être, son débat avec Aristote, et son étude de la genèse de la conception vulgaire du temps, le présent cours apporte certes quelque lumière sur la troisième section (jamais publiée) d’Être et Temps, mais il thématise aussi, expressément et pour la première fois, la différence ontologique. Il contribue, de façon décisive, à travers l'analyse et la "déconstruction" de quatre thèses sur l'être (la thèse kantienne, la thèse de l'ontologie médiévale, la thèse de l'ontologie moderne et la thèse de la logique), à la détermination de l'idée de la phénoménologie, envisagée dans sa possibilité."

Plan du cours (selon Martin Heidegger, p. 42-43)

Le mouvement de pensée de ce cours se divisera en trois parties :

I) Discussion phénoménologico-critique de quelques thèses traditionnelles sur l'être.

II) La question ontologique fondamentale du sens de l'être en général. Structures et modalités fondamentales de l'être.

III. La méthode scientifique de l'ontologie et l'idée de phénoménologie

La première partie se décompose en quatre chapitres :


1) La thèse kantienne : l'être n'est pas un prédicat réel.

2) La thèse de l'ontologie médiévale, remontant à Aristote : le quid-est (essence) et l'existentia (l'être-subsistant) appartiennent à l'être de l'étant.

3) La thèse de l'ontologie moderne : les modalités fondamentales de l'être sont l'être de la nature (res extensa) et l'être de l'esprit (res cogitans)

4) La thèse de la logique : tout étant, quel que soit son mode d'être respectif, peut être abordé et discuté grâce au "est". L'être de la copule.

La seconde partie se subdivise à son tour en quatre points :

1) Le problème de la dif-férence ontologique (différence de l'être et de l'étant).

2) Le problème de l'articulation fondamentale de l'être (essentia-existentia)

3) Le problème des modifications possibles de l'être et le problème de l'unité de sa diversité.

4) Le caractère véritatif de l'être.

La troisième partie de subdivise aussi en quatre chapitres :

1) Le fundamentum ontique de l'ontologie et l'analytique du Dasein comme ontologie fondamentale.

2) L'apriorité de l'être - possibilité et structure de la connaissance a priori.

3) Les éléments fondamentaux de la méthode phénoménologique ; réduction, construction, déconstruction.

4) L'ontologie phénoménologique et le concept de philosophie.

Lire absolument la deuxième partie, à partir de la page 276 : la question ontologique fondamentale du sens de l'être en général. Les structures fondamentales et les modes fondamentaux de l'être. Le problème de la dif-férence ontologique. (Sur la relation entre l'être, le Dasein et la temporalité)

Heidegger aimait poser la question suivante : dans l'expression "être et temps" (Sein und Zeit) quel est le concept est le plus important ? Et il répondait : le temps (Zeit).

"Ce qu'embrasse l'analytique existentiale a été exposé, pour l'essentiel, dans mon ouvrage Sein und Zeit. L'aboutissement de l'analytique existentiale, c'est-à-dire de la mise en évidence de la constitution ontologique du Dasein et de son fondement peut s'énoncer ainsi : la constitution ontologique du Dasein se fonde dans la temporalité."

ou encore :

"La condition ontologique de possibilité de la compréhension de l'être est la temporalité elle-même. C'est donc dans la temporalité qu'il faut aller chercher ce à partir de quoi nous comprenons quelque chose comme l'être."


Notes de lecture :

§ 1. Exposition et articulation générale du thème.

"L'objet de ces leçons (nouvelle élaboration de la troisième section de la première partie de Sein und Zeit) est de poser et d'élaborer les problèmes fondamentaux de la phénoménologie, - le cas échéant de contribuer à leur solution. C'est à partir de ce que la phénoménologie prend pour thème et de sa méthode de recherche qu'il faut laisser se déployer son concept. La présente considération a pour objet le teneur réale (Sachgehalt) et la systématicité interne des problèmes fondamentaux de la phénoménologie. Elle a pour but l'élucidation de ces problèmes à partir de leur fond."

Les trois parties du cours :

1) Questions phénoménologiques concrètes destinées à introduire aux problèmes fondamentaux

2) Le problèmes fondamentaux de la phénoménologie au point de vue de leur fondation-en-raison et de leur systématicité

3) Le mode de traitement scientifique de ces problèmes et l'idée de phénoménologie

Les problèmes phénoménologiques concrets et spécifiques ne peuvent pas se déduire du seul concept de phénoménologie.

La recherche phénoménologique ne peut rien représenter d'autre que la compréhension de l'idée de philosophie comme science, à la réalisation de laquelle furent consacrées, depuis l'Antiquité jusqu'à Hegel, des efforts toujours renouvelés et convergents.

Jusqu'à présent, et à l'intérieur même de l'école phénoménologique, la phénoménologie a été conçue comme une discipline philosophique préscientifique, destinée à préparer le terrain pour les sciences proprement philosophiques que sont la logique, l'esthétique l'éthique et la philosophie de la religion.

Cependant, pour Heidegger, la phénoménologie n'est pas une science philosophique parmi d'autres, ni une propédeutique aux autres sciences, mais la méthode de la philosophie scientifique en général.

Depuis l'Antiquité, philosophia = science en général.  Heidegger explique qu'après que certaines sciences comme la médecine et les mathématiques se furent détachées de la philosophie, la dénomination de "philosophia" fut réservée à "cette science qui est à la base de toutes les autres sciences particulières" et qu'elle comprend en son sein.

Certains refusent de parler de philosophie "scientifique".  La philosophie serait, d'après eux une "sagesse pour le monde et pour la vie" (Welt und Lebensweisheit), une "vision du monde" (Weltanschauung)

§ 2. Le concept de philosophie. Philosophie et vision du monde (Weltanschauung)

Heidegger se propose d'expliciter la notion de "Weltanschauung" dans son rapport à la philosophie.

Il explique que l'expression ne vient pas du grec, mais qu'elle a été forgée au sein de la philosophie allemande :

Chez Kant, dans la Critique du Jugement, la Weltanschauung signifie la considération (l'appréhension) de la nature telle qu'elle s'offre aux sens.

Chez Schelling, le terme se rapproche de la signification moderne et désigne une manière indépendante, productrice et consciente d'appréhender et d'interpréter le tout de l'étant.

A la suite de Hegel, on entend aujourd'hui par "Weltanschauung" l'appréhension de l'ensemble des réalités naturelles, mais aussi l'interprétation du sens et de la fin de l'existence humaine et de l'histoire.

Comme l'explique de son côté Karl Jaspers, une vision du monde est une réalité (une construction) individuelle (chaque individu a la sienne), mais elle peut être imitée (empruntée) à autrui, donc collective et relever aussi bien de la science (de la raison) ou de la superstition, des préjugés, de l'opinion et un peu de tout cela à la fois.

La philosophie est Weltanschuungsphilosophie. Elle a pour visée l'universel, l'origine, la fin et le sens (le pourquoi) du monde et de la vie.

Elle se distingue des sciences particulières qui n'envisagent qu'un domaine circonscrit de l'existence.

La philosophie a pour objet l'élaboration d'une Weltanschauung. Cette Weltanschauung doit être "scientifique", dans le sens où  :

a) Elle doit tenir compte des résultats des différentes sciences et les utiliser pour construire son image du monde (Weltbild)

b) Elle doit constituer sa Weltanschauung en suivant rigoureusement les règles de la pensée scientifique.

La philosophie peut et doit définir ce qui constitue la structure d'une Weltanschauung en général. Mais elle ne peut jamais donner telle ou telle configuration à une Weltanschauung déterminée, ni l'instituer.

L'élaboration d'une Weltanschauung n'appartient pas à la tâche de la philosophie car la philosophie ne se rapporte jamais de manière thétique à un étant déterminé.

La philosophie, à la différence des sciences, ne se rapporte pas positivement à l'étant (la nature, l'Histoire, Dieu, l'espace, le nombre, etc.)

Nous ne pouvons appréhender l'étant comme tel (l'étant en tant qu'étant), que si nous comprenons (préalablement) quelque chose comme l'être (de l'étant).

La compréhension de l'être avant toute expérience factuelle de l'étant est antérieure à cette expérience.

§ 3. La philosophie comme science de l'Être

L'Être est le véritable et unique thème de la philosophie. Heidegger prend soin de préciser qu'il ne s'agit pas là d'une "invention personnelle", mais que cette position thématique prend naissance dès le commencement de la philosophie dans l'Antiquité et s'achève dans la Logique de Hegel.

Cela veut dire que la philosophie n'est pas la science de l'étant, mais la science de l'être, ou encore qu'elle est ontologie.

"Élucider les problèmes fondamentaux de la phénoménologie = justifier, dans son fond, cette affirmation que la philosophie est science de l'être et comment elle l'est."

La philosophie en tant que science de l'être (de l’être en tant qu'être) se distingue donc de la Weltanschauung qui est une connaissance thétique de l'étant.

L'élaboration d'une Weltanschauung ne fait partie des tâches de la philosophie parce que la philosophie, dans son principe n'est pas relative à l'étant.

La différence entre la philosophie comme science et la philosophie comme Weltanschauung est caduque parce que la philosophie en tant que science de l'être ne peut pas prendre des positions ontiques déterminées.

Heidegger se propose donc de fonder la philosophie à partir d'elle-même comme œuvre de la liberté humaine et comme ontologie universelle.

Différence entre la philosophie et les sciences positives :


Les propositions des sciences positives, y compris les sciences "a priori" comme les mathématiques, sont des propositions positives.

L'étant comme "nature" = nature inanimée, nature vivante, monde végétal, monde animal

L'étant comme "histoire" = histoire de l'art, histoire politique, histoire des sciences, histoire des religions

Nous pouvons toujours nous représenter un étant déterminé relevant de tel ou tel domaine.

Mais en ce qui concerne la philosophie, nous ne pouvons pas nous représenter l'être.

l'étant : une table, une chaise, un arbre, le ciel, un corps, des mots, des actions, etc.

l'être : ??? = je ne peux rien me représenter.

C'est la raison pour laquelle Hegel identifie l'être au néant.

La philosophie comme science de l'être serait donc la science du "rien" ?

Sous l'être, je ne peux rien me représenter. Nous employons constamment le mot "être" et nous "comprenons", d'une certaine manière, ce que nous voulons dire par là, mais nous ne pouvons pas le "concevoir".

comprendre/concevoir.

L'être est le concept le plus simple et le plus évident (selbstverständlich), mais aussi le "plus embrouillé et le plus obscur de tous".

"A supposer que la philosophie soit la science de l'être, alors la question initiale et ultime, la question fondamentale de la philosophie est la suivante : que signifie être ? A partir de quoi quelque chose comme l'être en général est-il intelligible ? Comment la compréhension de l'être est-elle en général possible ?

§ 4. Les quatre thèses sur l'être et les problèmes fondamentaux de la phénoménologie

La première partie du cours traite de quelques thèses caractéristiques sur l'être, qui ont été formulées depuis l'Antiquité au cours de l'histoire de la philosophie.

1) La thèse kantienne : l'être n'est pas un prédicat réel

2) la thèse de l'ontologie médiévale (scolastique), remontant elle-même à Aristote : le ce-que-c'est (Was-sein) (essentia) et l'être présent-subsistant (Vorhandensein) (existentia) appartiennent à la constitution ontologique de l'étant.

3) La thèse de l'ontologie moderne  : les modalité fondamentales de l'être sont respectivement l'être de la nature (res extensa) et l'être de l'esprit (res cogitans)

4) La thèse de la logique au sens large du terme : tout étant se laisse aborder, indépendamment de ce qui constitue à chaque fois son mode d'être, à travers le "est" ; l'être de la copule.

La deuxième partie traite  de la question-fondamentale (Fundamentalfrage) de toute science de l'être, la question du sens de l'être en général.

"La discussion de la question-de-fond du sens de l'être en général et des problèmes qui lui sont inhérents recouvre l'ensemble des problèmes fondamentaux de la phénoménologie envisagée dans son fondement systématique."

Nous entrons à présent au cœur de la pensée de Heidegger : la mise en relation de l'être, de cet étant particulier (celui que nous sommes) qui possède une entente préalable de l'être : le Dasein (la réalité humaine) et le Temps.

Faisons le point :

- L'entente de l'être est sous-jacente à toute attitude par rapport à l'étant.

- Les différents comportements vis-à-vis de l'étant caractérisent en propre à leur tour un étant déterminé que nous sommes : le Dasein humain.

- La compréhension de l'être appartient en propre au Dasein.

- Il convient donc de déterminer de manière adéquate et originaire la structure ontologique du Dasein.

- Il convient de se demander ce qui, dans la structure ontologique du Dasein, rend possible la compréhension de l'être en général, ou encore à  partir de quel horizon nous comprenons  quelque chose comme "être".

"La temporalité (Zeitlichkeit) se dévoile, pour l'analytique ontologique du Dasein, comme la constitution originaire de l'être du Dasein.

En d'autres termes, le temps est l'horizon à partir duquel quelque chose comme l'être en général est intelligible. Nous interprétons l'être à partir du temps. Notre interprétation est une interprétation temporale. La problématique de fond de l'ontologie comme détermination du sens de l'être à partir du temps est donc celle de la temporal-ité (Temporalität)

Heidegger insiste sur la nécessité de se poser les questions suivantes :

Comment envisager la différence de l'être et de l'étant ?

Comment rendre compte de cette possibilité ?

Si l'être lui-même n'est pas un étant, comment appartient-il alors lui-même à l'étant, s'il est vrai que l'étant et lui seul est ?

Que signifie l'expression ; l'être appartient à l'étant ?

La différence entre l'être et l'étant est désignée par Heidegger comme dif-férence (Differenz) ontologique, c'est-à-dire comme scission (Scheidung) entre l'être et l'étant.

Pour parvenir à l'être, nous allons "au-delà" de l'étant. Heidegger reprend à Kant le mot "transcendantal" pour exprimer cette visée.

Mais ce n'est pas pour accéder à un autre étant "qui se tiendrait derrière" l'étant que nous connaissons. (allusion à la notion nietzschéenne d'arrière-monde)

La philosophie est la science transcendantale critique de l'être (elle opère la distinction "critique" (krinein en grec = cribler) entre l'être et l'étant.

Heidegger se proposera de montrer que l'ontologie antique et celle du moyen âge ont formulé dogmatiquement, comme allant de soi la proposition qu'à tout étant appartient un quid et un quomodo (essentia et existentia) : toute chose a son "quid" : ce qu'elle est - et son "quomodo" : comment elle est.

Ces deux détermination, le quid et le quomodo, l'essence et l'existence, appartiennent-elles à l'être lui-même ?

"Nous nous trouvons ainsi confrontés au problème de l'articulation fondamentale de l'être (Grundarticulation des Seins), c'est-à-dire à la question de la nécessaire co-appartenance du quid-est et du quomodo, de leur commune appartenance unitaire à l'idée de l'être en général." (p. 36)

La question est de savoir si le mode d'être a pour tout étant le même caractère (conception traditionnelle) ou bien si certains modes d'être sont distincts les uns des autres.

L'ensemble des question portant sur l'être se laisse résumer dans le problème des modifications possibles de l'être et de l'unité de sa diversité. (cf. Aristote : "l’Être se dit de multiple manières")

Il n'y a de l'être qu'avec la révélation (Erschlossenheit) spécifique qui caractérise la compréhension de l'être. La révélation d'une chose = sa vérité.

Mais il ne peut y avoir de vérité que s'il existe un étant qui la mette au jour. Nous sommes nous-mêmes un étant de ce genre, pour lequel il y a de la vérité parce qu'il y a de l'être. Révéler, mettre au jour la vérité appartient au mode d'être de cet étant.

Cet étant est le "Dasein". Il n'y a de vérité (ou d'erreur) que par rapport au Dasein (réalité humaine). Cette relation entre l'être et la vérité fait l'objet de la partie du cours consacrée au problème véritatif de l'être.

§ 5. Le caractère méthodique de l'ontologie. Les trois éléments fondamentaux de la méthode phénoménologique.

La philosophie (l'ontologie) n'a rien en commun avec la méthode des autres sciences qui toutes, en tant que sciences positives, traitent de l'étant (et non de l'être de l'étant).

L'analyse du caractère de vérité de l'être montre que l'être se fonde dans un étant déterminé, le Dasein.

L'étant particulier qu'est le Dasein revendique donc un primat insigne.

C'est la raison pour laquelle l'élaboration de la question fondamentale du sens de l'être requiert une analytique générale du Dasein.

L'ontologie ne se laisse donc pas fonder d'une manière purement ontologique. L'histoire de la philosophie occidentale montre que le fondement de l'ontologie n'est pas  un fondement ontologique, mais un fondement ontique : le Dasein.

La philosophie, œuvre de la liberté du Dasein de l'homme est rivée à son existence, c'est-à-dire  à la temporalité du Dasein, à son historicité.

La temporalité est la dimension du Dasein en tant qu'il "ex-iste"

"La première tâche d'une élucidation du caractère scientifique de l'ontologie est de mettre en évidence son fondement (fundamentum) ontique et de caractériser cette fondation (Fundierung).

Concepts-clés  :

   la connaissance apriorique de l'être
   l'application de la méthode phénoménologique à la question de l'être
   la notion de "réduction phénoménologique" chez Heidegger (et chez Husserl)
   La construction phénoménologique
   La déconstruction phénoménologique

La connaissance apriorique de l'être

Heidegger explique qu'il est apparu très tôt dans l'Antiquité que l'être et ses déterminations (déterminités) précèdent l'étant comme "ce qui est premier' (proteron). L'être en tant qu'a priori est antérieur à l'étant. "Seule l'interprétation de l'être à partir de la temporalité peut faire comprendre pourquoi et comment ce caractère d'apriorité (de priorité de l'être par rapport à l'étant), va de pair avec l'être."

L'application de la méthode phénoménologique à la question de l'être

L'être est aussi et à chaque fois l'être de l'étant et il n'est accessible qu'à partir de l'étant. Il faut donc que le regard phénoménologique se dirige aussi sur l'étant, mais de telle sorte que par là l'être de l'étant ressorte et parvienne à une thématisation possible.

La notion de "réduction phénoménologique"

"L'élément fondamental de la méthode phénoménologique, au sens de la reconduction du regard inquisiteur de l'étant naïvement saisi à l'être, nous le désignons par l'expression de réduction phénoménologique."

La notion de "réduction phénoménologique chez Heidegger et chez Husserl

Pour Husserl, la réduction phénoménologique, telle qu'il l'a élaborée pour la première fois explicitement dans les Ideen de 1913, est la méthode destinée à reconduire le regard phénoménologique de l'attitude naturelle de l'homme vivant dans le monde des choses et des personnes à la vie transcendantale de la conscience et à ses vécus noético-noématiques, dans lesquels les objets se constituent en tant que corrélats de la conscience.

Pour Heidegger, la réduction phénoménologique désigne la reconduction du regard phénoménologique de l'appréhension de l'étant -quelle que soit sa détermination - à la compréhension de l'être de cet étant (projet en direction, ajoute Heidegger, de son "être à découvert".

La construction phénoménologique


"L'être n'est jamais accessible comme l'étant, nous ne le trouvons jamais simplement là-devant, mais il doit toujours être porté au regard dans un libre projet. Le projet de l'étant pré-donné, eu égard à son être et à ses structures ontologiques, nous le nommons construction phénoménologique."

La déconstruction phénoménologique

Toute élucidation philosophique, si radicale soit-elle, demeure pénétrée de concepts reçus en héritage ; il n'est pas du tout certain que ces derniers proviennent originairement et authentiquement du domaine ontologique et de la constitution d'être qu'ils prétendent concevoir. L'interprétation de l'être et de ses structures, c'est-à-dire la construction réductrice de l'être, implique donc nécessairement une destruction, autrement dit une dé-construction (Abbau) critique des concepts reçus, qui sont d'abord nécessairement en usage, afin de remonter aux sources où ils ont été puisés. C'est seulement par cette destruction (déconstruction) que l'ontologie peut phénoménologiquement s'assurer de l'authenticité de ses concepts.

Conclusion :

Les trois éléments fondamentaux de la méthode phénoménologique :

   réduction
   construction
   destruction (déconstruction)


sont intrinsèquement dépendants les uns des autres et doivent être fondés en leur co-appartenance. la construction philosophique est nécessairement destruction (déconstruction), accomplie à travers un retour historique à la tradition. Cela ne signifie pas la négation de la tradition, mais son appropriation positive. Parce que la destruction appartient à la construction, la connaissance philosophique est du même coup, de par son essence, en un certain sens, connaissance historique. "L'histoire de la philosophie" appartient donc au concept de philosophie comme science, au concept de recherche phénoménologique.
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