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John
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Le collège Jean Jaurès à Saint Ouen, un "établissement calme" Empty Le collège Jean Jaurès à Saint Ouen, un "établissement calme"

par John Dim 29 Mai 2011 - 2:18
http://education.blog.lemonde.fr/

26 mai 2011
Jean-Jaurès à St-Ouen: chronique d’un collège «calme»

Après le passage à tabac, le mercredi 25 mai d’un adolescent d'une quinzaine d'années agressé devant son collège à Saint-Ouen (Seine-Saint-Denis), l’inspecteur d’académie Daniel Auverlot a déclaré que cet établissement, le collège Jean-Jaurès, était « dans l’ensemble, un établissement calme » et que la dernière agression comparable y remontait à trois ans.

Les professeurs du collège récusent le qualificatif de « calme » attribué à leur établissement. Accueillant environ 750 élèves en centre-ville et face à la mairie, ce collège a effectivement connu une période très dure il y a trois ans, au terme de laquelle l’équipe avait obtenu un conseiller principal d’éducation (CPE) supplémentaire et des heures de surveillance en plus.

Quelques heures après les faits, un des trois agresseurs présumés a été interpellé dans la commune. On avait d’autre part appris, jeudi en fin de matinée, que l’état de santé de l’adolescent, un élève de troisième prénommé Mathieu, s’était heureusement amélioré.

Le texte qui suit est extrait d’un document saisissant, rédigé il y a trois ans par un membre de l’équipe du collège. Ce texte illustre bien cette situation où un établissement peut être jugé « calme » par l’administration tout en étant un endroit insupportable au jour le jour.

Le voici, brut, sans aucune modification. Mieux que de longs discours, il donne une idée de ce qu'est enseigner ou tenter de le faire dans ce type d'établissement.

Luc Cédelle

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Historique des actions menées au collège Jean Jaurès (Saint-Ouen)

Contexte :

Climat de tension depuis la rentrée 2007 : incivilités quotidiennes (pendant les cours, dans les couloirs du collège). Des surveillants dépassés par les événements. Des élèves de plus en plus absentéistes. Qui hantent les couloirs au vu et au su de tous et sur lesquels il est difficile d’avoir prise.
Nombreux conseils de discipline (Trop selon nos autorités – plus d’une vingtaine en 2006-2007. Chiffres à peu près identiques cette année) trop tardifs selon certains professeurs.
Une poignée d’élèves exclus les années précédentes et au cours de cette année investissent le seuil du collège, gênent les entrées et les sorties, créent un climat pesant. Belliqueux, ils insultent les professeurs, viennent régler des comptes avec des élèves, installent une atmosphère délétère (bagarres sur le parvis, intrusions très fréquentes et rarement pacifiques). Notre direction multiplie les signalements mais néglige les plaintes sauf dans les cas très graves.

Véritable élément déclencheur :
Janvier 2008 : découverte d’une bombe à l’acide chlorhydrique devant une salle de classe.
Réaction immédiate : exercice du droit de retrait (aussitôt contesté par l’IA) + grève.
Soutien des parents d’élèves

Pour dénouer la situation, l’IA (représentée par M. Rouquette, accepte de recevoir une délégation (membres élus du CA - parents et enseignants -, représentants de la mairie), nous affirme son soutien ( !) et nous fait des propositions. Nos revendications n’ont pas encore pris leur forme définitive.

• Maintien de 2 postes de surveillance en CAE (devant l’urgence, nous n’argumentons pas sur le caractère précaire de ces emplois)
• Ajout d’un poste de surveillance en CAE
• Diagnostic Vie scolaire

L’IA déplore de ne pouvoir pourvoir le ½ poste d’infirmière qui nous fait défaut (créé mais vacant faute de candidats). On nous renvoie au Rectorat pour ce qui est de l’attribution d’un poste de CPE supplémentaire, de même que pour l’affectation de l’infirmière. On nous rappelle que nous disposons d’une dotation en heures REP pour mettre en place des actions de prévention en partenariat.
Des queues de cerises ! (De plus, les élus présents au cours de l’audience et l’IA se renvoient la balle, parasitent la discussion par des débats politiciens, alors que nous avons besoin d’appui et de mesures concrètes.)

De notre côté :
- Contacts avec la Mairie de Saint-Ouen (réactivation du CLS), les éducateurs de la ville, avec le Conseil général (Notre établissement n’est pas suffisamment sécurisé. On y entre et sort comme dans un moulin.), avec la Police nationale.

Entre février et juin :

Rien de ce qui a été promis ne vient sauf la visite-diagnostic-conseil-vie-scolaire au terme de laquelle, Mme Lemoigne, adjointe de l’Inspecteur d’académie, constate que nous manquons de personnel de surveillance au vu de la configuration des locaux et qu’il faut alléger la charge de travail de nos CPE qui donnent déjà beaucoup. Elle confirme le CAE supplémentaire promis.
Difficultés de notre principal pour recruter lesdits CAE (L’ANPE ne fait pas suffisamment de propositions, les rares candidats ne seraient pas qualifiés pour les postes proposés.)
Le CG ne se presse pas pour accéder à nos demandes de sécurisation.
La situation empire aux abords et à l’intérieur du collège jusqu’à l’insupportable : Pas un jour sans une insulte, un crachat, une pierre, une intrusion qu’il faut gérer de manière plus ou moins musclée. A l’intérieur, des départs d’incendie, tous repérés à temps, dans les toilettes, dans les couloirs. (NB : nous enseignons dans un vieil et bel établissement doté de nombreux planchers.)
Malgré nos récriminations, la situation ne semble pas émouvoir tous ceux à qui nous avons fait appel.

Courant mai (Ce qui a précipité les choses) :

- Une enseignante d’EPS assure son cours dans le stade municipal (ouvert sur l’extérieur), elle fait l’objet devant sa classe d’insultes ordurières et de menaces en tous genres (viols et autres abjections !). C’est le fait des élèves exclus qui hantent les abords du collège, flanqués d’élèves problématiques encore inscrits. On lui fait savoir qu’elle doit porter plainte en son nom propre.

Indignation des collègues : Nous nous rendons en nombre au commissariat (23 enseignants) pour porter plainte ensemble. Chacun y va de sa plainte et rapporte des faits survenus au cours des semaines qui ont précédé. La Police est ravie. Elle nous apprend que trop peu d’éléments sont rapportés par le collège, que certain parmi nos anciens élèves ont un dossier trop léger pour pouvoir être étudié par la justice.

Notre principal procède beaucoup par signalements à l’IA, ainsi qu’on l’exige de lui, et nous confesse être lui-même être l’objet de menaces directes très explicites. Au cours de cette période, un ancien élève s’est introduit dans l’établissement (pour mettre ses menaces contre le principal à exécution) mais a été arrêté à la dernière minute par un collègue alors qu’il s’apprêtait à pénétrer dans le bureau de notre chef d’établissement.

La grogne s’amplifie

Vendredi 6 juin 2008
- La même semaine, vendredi 6 juin, dans la nuit, une salle de classe du collège est vandalisée. La presse est avertie (article paru dans le Parisien – édition locale – daté du samedi 7 juin)
Réaction des enseignants :
- Exercice du droit de retrait (encore). Même traitement par l’IA (contestation) que lors de la 1ère action. Vote de la grève reconductible. Dépôt de préavis pour le lundi suivant (aucun cours ne sera assuré ce jour-là). Le SNES est contacté, nous apporte conseils, soutient nos démarches.
- Demande d’audience à l’IA
- Demande d’audience au Rectorat
- Lettre au CG pour les travaux de sécurisation
- Contacts avec les élus locaux et les parents d’élèves (mobilisation rapide et efficace)

Nos revendications ont pris forme :

- Un CPE supplémentaire (demande légitimes au vu de notre profil d’établissement, de nos effectifs et par comparaison avec les autres établissements du district.)
- La requalification des postes de CAE confirmés ou promis en postes d’assistants d’éducation (3)
- Le recrutement d’une infirmière à affecter sur le ½ poste vacant.
- L’appui de nos démarches auprès des diverses instances interpellées (CG, etc.)
- L’abondement de notre DHG pour mettre en place des projets de prévention de la violence.
En off : nous souhaiterions être assurés que notre principale adjointe qui nous quitte (mutation) soit remplacée dans la mesure du possible par quelqu’un qui ne soit ni stagiaire ni faisant fonction de.

Lundi 9 juin 2008
L’IA propose de se déplacer dès le lundi suivant (le 9 juin). Dans l’improvisation, se monte une comité d’accueil : des parents d’élèves nombreux, une adjointe au maire, M. Hanotin, vice-président du CG, le député Leroux veulent assister à l’entretien.
Gêne de l’IA qui menace de partir puis accepte le dispositif.
Dispositif (en concertation) : Nul ne s’exprime sauf la délégation des personnels.

L’IA, acculé (nous lui rappelons ses promesses non tenues) réagit mal et perd en crédibilité aux yeux de l’assistance. La séance est levée. Nous n’avons rien obtenu de plus que quelques heures pour des projets de prévention de la violence (le nombre n’est pas déterminé, 4 ou 5, nous dit-on.). L’attribution des CAE, si elle n’est pas remise en cause est laissée dans le plus grand flou.
Réunis en assemblée générale, les personnels enseignants, insatisfaits des réponses qui leur ont été apportées, votent aussitôt la reconduction de la grève.

A l’issue de cette rencontre, le CG nous assure qu’il est disposé à procéder aux travaux de sécurisation d’urgence pourvu que nous les lui rappelions par courrier au plus vite (chose faite le lendemain). On nous reproche de ne pas avoir insisté auparavant (On a beau jeu de le faire).

Mardi 10 juin 2008

AG diverses au cours de la journée suivante, mardi 10 juin (jour de la grève nationale de la fonction publique), actions, contacts. Une réunion avec les parents est prévue pour jeudi 12 juin (Appel de toutes les familles. Chaque PP se charge de sa classe.) pour faire le point sur la situation.
Nous attendons une réponse du Rectorat. Notre principal est sur le pont : les coups de fils se succèdent. Quelque chose est en train de se passer. On nous fait lanterner toute la journée.
Coup de théâtre : la réponse du Rectorat arrive à 16h00, pendant le vote sur la reconduction (Vous avez dit bizarre !). Rendez-vous est pris : une délégation sera reçue lundi 16 juin 2008 dans la matinée (détail savoureux : la délégation reçue, doit être constituée, nous dit-on, d’enseignants qui n’ont pas cours à ce moment-là !).

Mercredi 11 juin 2008
Débats sur l’attitude à adopter : reconduire ou chercher d’autres solutions au vu des avancées.
Cadre de réflexion : malgré la belle mobilisation, le mouvement risque de s’essouffler rapidement s’il demeure raide. De nombreux enseignants expriment leur soutien mais font part de difficultés légitimes à poursuivre sur une ligne dure. La période est tout sauf propice à la mobilisation.
Pour entrer dans le jeu stratégique du Rectorat, nous votons à la majorité la reprise des cours dès le lendemain (signe de bonne volonté) mais nous déposons un préavis de grève pour mardi 17 (au lendemain de l’audience au Rectorat). Nous aviserons de la conduite à tenir au sortir de l’entrevue. Elle dépendra de la satisfaction ou non de nos revendications.
En cours :
- Mise au point de la plate-forme de revendications (les mêmes que celles exposées plus haut mais plus argumentées), préparation de l’argumentaire, constitution de la délégation (Il est entendu que nous prenons la demande du rectorat de ne faire participer que des personnels ne travaillant pas à la date prévue comme une pochade.).
- Mise au point de l’ordre du jour pour la réunion de jeudi 12 avec les parents. Il s’agit maintenant de leur demander de nous appuyer et de nous accompagner au Rectorat lundi.
- Invitation des élus à cette réunion. Demande de soutien sous la forme qui paraîtra la plus appropriée.

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par Condorcet Dim 29 Mai 2011 - 2:27
Le moins que l'on puisse dire est que la vie de cet établissement inquièterait plus d'un professeur s'il devait y faire cours et que les professeurs qui acceptent d'y travailler mériter un traitement double pale
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User5899
Demi-dieu

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par User5899 Dim 29 Mai 2011 - 12:49
condorcet a écrit:Le moins que l'on puisse dire est que la vie de cet établissement inquièterait plus d'un professeur s'il devait y faire cours et que les professeurs qui acceptent d'y travailler mériter un traitement double pale
Il suffit de revoir les définitions. Nous appellerons "EPLE calme" tout établissement scolaire dans lequel le nombre des morts violentes par année scolaire est strictement inférieur à 3.
Et hop ! Fini les primes "établissement violence".
Reine Margot
Reine Margot
Demi-dieu

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par Reine Margot Dim 29 Mai 2011 - 12:55
ah, moi aussi l'étb pourri où j'étais l'an dernier était calme. Il n'y avait eu qu'une prof étranglée et un autre roué de coups. :|

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La famille Bélier
Thalie
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par Thalie Dim 29 Mai 2011 - 13:33
Ouille c'était mon collège quand j'étais dans le 93, le même dont parle Mara Goyet dans son premier ouvrage Collèges de France. J'y étais en 99-2000 et c'était déjà épouvantable. J'ai été en conflit alors avec :
-les deux jeunes néotits (comme moi) CPE qui me donnaient des conseils sur ma pédagogie dans une classe de 4e où les élèves montaient sur les tables lors du premier cours (j'étais remplaçante l'avant veille des vacances de la Noël)
- l'adjoint qui restait barricadé dans son bureau au 1er car il avait été molesté dans son ancien bahut
- la principale qui m'a tj fait penser à la reine vierge et qui s'est bien gardé de me dire que le collègue que je remplaçais était parti pour dépression parce que les 4e le ravageaient...
- le PP prof de maths des 6e qui m'a jetée parce que j'avais osé exiger des 6e qu'ils lèvent la main avant de parler.
Collège très difficile...Très mauvais souvenirs...
Un jour, je me suis interposée dans une bagarre (tj les mêmes 4e) entre une fille et un garçon en classe. Je me suis pris le coup d'un élève sur les lèvres (une s'est fendillée et je saignais). La jeune CPE monte, c'est la fin de l'heure, elle me voit tremblante, la lèvre en sang, les élèves pour le cours suivant attendent dehors, elle me laisse reprendre le cours comme si de rien n'était. Heureusement, certains collègues en salle des profs m'ont bien aidée et pris en main. Notamment la coordinatrice en Lettres qui était très bien.
Les élèves habitaient aux portes de Paris et ne sortaient jamais pourtant de St Ouen.

En effet, le bâtiment est un exemple parfait des établissements du début du siècle dernier. Entrée directe côté rue et métro, aucun SAS de sécurité. Salle des profs au RDC + cour. L'administratif se terre au 1er ou 2nd je ne sais plus mais a un escalier privé. Cela m'a tj profondément marquée dans ce bahut. Les chefs ne sortaient jamais de leurs bureaux, on ne les voyait jamais et nous, nous étions en première ligne au RDC avec la cour. Autant de distance entre une salle des profs et des administratifs ne me paraît pas une bonne idée.
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